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Tous les ans, à la fin du mois d’octobre, la Mongolie observe un drôle de manège dans ses steppes… Des centaines de nomades gagnent tranquillement la province du Khenti – celle-là même qui a vu naître le grand Gengis Khan – dans le but d’assister au festival des 10 000 chevaux. A l’arrivée de l’hiver, des troupeaux entiers de chevaux sont remis en liberté afin qu’ils retrouvent leur caractère sauvage. Oyunbileg, notre conseillère de voyage locale en Mongolie, nous en dit un peu plus sur cette coutume …
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Nous sommes là dans la dernière partie du plateau Sibérien, un massif montagneux qui culmine à 2 800 m. Bientôt, des centaines de nomades viennent chambouler la quiétude des lieux avec leurs éclats de rires et leur bonne humeur. Accompagnés de leur famille et de leurs bêtes, les nomades des steppes mongoles se déplacent avec la totalité de leurs affaires rangées dans des petits fourgons. Ils se rendent dans la région de Khenti pour participer à « taliin tumen aduu », le « festival des 10 000 chevaux ». Cet évènement se tient tous les ans à la même période, à l’approche de l’hiver. Tel un rite de passage, les nomades célèbrent ensemble leurs fidèles compagnons à quatre pattes dans une ambiance festive. Oyunbileg, conseillère dans notre agence de voyage locale en Mongolie, précise que « le but du festival est de faire se rencontrer beaucoup d’éleveurs pour qu’ils puissent choisir de nouveaux étalons ou de nouvelles juments. La tradition veut également qu’ils se défient entre eux et qu’ils définissent le meilleur cavalier parmi les nomades. » Oyunbileg explique qu’il est cependant assez difficile de décrire le déroulement de ce festival puisque celui-ci reste encore très confidentiel. D’après les petites oreilles qui s’y sont discrètement faufilées, les nomades font d’impressionnantes démonstrations de dressage et d’agilité. Ils prennent également part à des courses dans les règles de l’art mongol. Les nomades se présentent en général dans leurs très beaux costumes traditionnels et fêtent ce passage annuel autour de musiques et de danses mongoles. Le spectacle est total !
Une question nous vient alors à l’esprit : comment les nomades parviennent-ils à se tenir au courant des actualités locales dans leur yourte respective ? Comment savent-ils où se retrouver pour le festival ? Oyunbileg nous explique : « Tout se sait dans la steppe et c’en est même étonnant ! Même loin de tout, les infos circulent entre les nomades. Plus étonnant encore : ils ont le téléphone et la télévision. Il y a la chaîne « Malchin » qui veut dire « éleveur » en mongol et qui est très regardée par les nomades. Il y a quelques temps, j’ai contacté l’un de nos guides pour lui demander de contacter un chamelier afin qu’il nous donne un ou deux noms de bivouac pour nos clients. Sa réponse m’a fait bien rire » Je ne peux pas l’appeler, il n’a pas de téléphone … Mais je vais le contacter sur Facebook ! » Pour ce qui est du festival, il se situe tous les ans au même endroit et à dates fixes. Cela facilite les rassemblements.» Même si le festival des 10 000 chevaux reste très local et que la plupart des participants sont les habitants des environs, tous les mongols (qu’ils soient nomades ou non) et tous les voyageurs (d’où qu’ils viennent) sont conviés à cet événement !
Très peu de temps après la fin de ce festival, des centaines de troupeaux de chevaux sont relâchés dans les steppes. Pendant toute la durée de l’hiver, ils vont ainsi évoluer librement sous la protection de leur étalon. Il existe plusieurs raisons pour lesquelles les nomades décident de se séparer de leurs chevaux pour l’hiver. La première réside dans leur volonté de ne pas les domestiquer totalement. Dans leur culture, les mongols se doivent de laisser les bêtes se débrouiller seules dans les steppes. Ils ne sont d’ailleurs pas équipés pour les garder avec eux pendant l’hiver ; ils n’ont pas d’enclos pour les protéger suffisamment du froid et n’ont pas les moyens de faire des réserves de nourriture pour l’hiver. Oyunbileg ajoute qu’en étant livrés à eux-mêmes, « les chevaux les moins vigoureux, s’affaiblissent et se font généralement manger par les loups. C’est une sélection naturelle qui garantit à la race de rester pure et très résistante. Les yacks et les vaches sont aussi relâchés dans la montagne. Seuls les moutons sont gardés en tout temps. Il arrive également aux nomades de conserver auprès d’eux uniquement les chevaux dédiés à leurs déplacements et quelques vaches qui fournissent le lait pour toute la famille. » Bien entendu, les chevaux vont avoir plus de mal à se nourrir lors de cette période, mais il faut voir cela comme une mise à l’épreuve. Les bêtes les plus vigoureuses qui passeront l’hiver seront très appréciées par les nomades pour leur force. Relâcher les troupeaux dans les steppes leur permet également de trouver eux-mêmes les meilleures zones de pâturage. C’est donc, au-delà de tout, un phénomène très naturel !
« A la sortie de l’hiver, les nomades doivent recréer leur cheptel en redomptant un troupeau de chevaux, celui-là même qu’ils ont relâché quelques mois auparavant. Les nomades n’ont pas à en capturer de nouveaux. Ils ont simplement à « reprendre en main » certains chevaux qui ont retrouvé leur caractère sauvage et dresser les quelques poulains qui survivent à l’hiver. Si, le plus souvent, cela ressemble à une capture, bien souvent, dés que le cheval a été attrapé au lasso, il se calme et se laisse seller sans souci. » Au bout de quelques temps dans la nature, ils ont retrouvé leur esprit « sauvage » et peuvent être parfois difficiles à dresser. « Mais il est aussi assez fréquent que les nomades ramènent les troupeaux 2 à 3 fois dans l’hiver, auprès du camp pour leur donner du fourrage, du son et du sel, donc les chevaux prennent peu à peu leurs repères », ajoute Oyunbileg. En règle générale, il n’est pas très difficile de retrouver les troupeaux de chevaux au printemps. Les étalons sont assez territoriaux et respectent naturellement une même zone bien délimitée. Ainsi, dans la plupart des cas, les nomades savent où aller chercher leurs troupeaux.
Souvent décrite comme « la terre du cheval », la Mongolie porte en véritable honneur cet animal. Il n’est d’ailleurs pas rare d’observer des petits nomades de 4 ou 5 ans sur le dos d’un cheval. Une loi est même passée récemment en Mongolie ; désormais, pour participer aux courses de chevaux il faut que les cavaliers soient âgés d’au moins 7 ans. Selon les statistiques, la moitié de ce grand pays, constitué de 3 millions d’habitants, élèvent des chevaux. A la fois compagnon de voyage sûr et outil indispensable à la vie des nomades, le cheval est la pièce maîtresse de cette culture. Sans lui, ils ne peuvent rien faire et ne peuvent pas se déplacer. « Le troupeau de chevaux est la partie le plus importante du cheptel d’une famille. Il est la plus-value d’un éleveur ; les nomades préfèrent laisser un troupeau grossir, plutôt que de les vendre. Ce sont alors les moutons qui constituent « l’argent » de la famille. » Oyunbileg termine avec un vieil adage qui en dit beaucoup sur l’importance primordiale du cheval dans la culture mongole ; «« Un nomade qui marche est un nomade qui n’a pas de cheval. » Il y a quelques temps, les familles qui ne possédaient pas de chevaux étaient souvent des familles d’ouvriers ou, dans tous les cas, des familles plutôt pauvres. Le cheval était alors considéré comme un titre de noblesse. Encore aujourd’hui, une famille qui possède un beau troupeau de chevaux est considérée comme étant en haut de l’échelle sociale. »
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L’agence locale mongole partenaire de bynativ est l’une des seules à proposer à ses voyageurs de se rendre sur place lors du festival des 10 000 chevaux en Mongolie. Et si vous en faisiez partie ? Réservez vite !