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Bien que cela soit le plat national, la Cachupa est plutôt difficile à trouver dans les restaurants. La quantité des matières de base servant à la préparer étant importante, les restaurateurs la préparent seulement lors de commande en amont afin que la quantité produite soit consommée sans gaspillage. Ludovic a eu la chance d’assister à sa préparation sur l’île de Santa Antao au Cap-Vert. Pour bynativ, il nous raconte son expérience gustative !
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Dans un restaurant situé dans le cœur de l’île, aux abords du cratère, je fais la connaissance de Mariam, une capverdienne originaire de l’île de Sao Vicente. Les cabas remplis de courses effectuées dans la ville de Porto Novo, la capitale de l’île, Mariam en retire délicatement les produits qu’elle pose sur la table. D’abord le maïs, puis les haricots rouges, les pommes de terre et le manioc. Au fond du premier sac, elle fouille et saisit en même temps les oignons et les gousses d’ail, sans oublier la tomate et le chou. Recette personnelle, elle aime y rajouter quelques poivrons et des carottes.
Elle se dirige dans son armoire et récupère des cubes de bouillons de volaille ainsi que du sel et du poivre. Dans l’autre sac, elle retire la viande de porc, la saucisse et le lard fumé qui emplit la pièce de son odeur particulière. Elle termine par les deux bottes de persil et de coriandre fraîche. La voilà prête !
Mariam pose sur le feu une grande cocotte en aluminium qui a fait son temps. Rapée, usée, ses bords en aluminium tiennent difficilement, mais au Cap Vert, l’obsolescence programmée est une notion absente de la plupart des vocabulaires. La cocotte est âgée de vingt ans et, dans un sourire à peine dissimulée, Mariam espère qu’elle tienne encore le double.
Après avoir versé un peu d’huile d’arachide, qui atteint rapidement la température escomptée, Mariam prépare ses ingrédients. Elle émince finement les oignons, qu’elle place dans une assiette, puis s’attelle à écraser les ails, dégermés au passage. Elle coupe ensuite les tomates en dés et retire des enveloppes les différentes viandes : 250 grammes de porc, 150 grammes de saucisse forte et 150 grammes du lard fumé, qu’elle coupe en dé et pour lequel, je ne résiste pas à en subtiliser un morceau, furtivement. Mais on ne la fait pas à Mariam. Piètre voleur que je suis, elle m’a pris sur le vif et c’est dans un éclat de rire qu’elle retourne vers sa cocotte. Elle y intègre les 600 grammes d’haricots rouges, le kilo de maïs, les oignons, les gousses d’ail et les dés de tomates. A la préparation, elle ajoute 3 cubes de bouillons et elle recouvre d’eau à niveau.
Pendant que la préparation cuit, elle se dirige dans la salle principale du restaurant afin de ranger les affaires laissées en l’état par les clients de la veille. Après une heure de ménage, elle retourne à ses fourneaux pour insérer à sa préparation la viande de porc salée. Une louchée de sel, une pincée de poivre. Le geste est précis, à la manière de Salt Bae le restaurateur turc, spécialisé dans les shows culinaires avec des stars et des hommes politiques, l’apparat et le spectacle en moins.
Le temps de cuisson devant atteindre 30 minutes, elle en profite pour éplucher le manioc, les pommes de terre, le chou et en couper tous les ingrédients en morceaux. Dans la cuisine, une odeur indescriptible commence à emplir la pièce. Celle de la cuisine traditionnelle agrémentée d’épices. J’en ai l’eau à la bouche. Mariam se baisse afin de récupérer une casserole qu’elle remplit d’eau salée. Elle y dépose délicatement les légumes fraîchement découpés. Sur la table, elle prépare la saucisse et le lard.
Dans une nouvelle casserole, elle cuit les morceaux de saucisse et le lard, qu’elle accompagne d’une quantité généreuse d’huile d’arachide : « pour donner du goût » me dit-elle. Puis, elle y rajoute un oignon émincé, le persil et une grande quantité de coriandre qu’elle hache immédiatement au-dessus du contenant.
Elle transvase cette nouvelle préparation dans la cocotte principale, puis retire et égoutte les légumes de la deuxième casserole qu’elle place dans une assiette. Dans une autre assiette, elle retire la viande. Elle place dans la cocotte le reste de la coriandre finement hachée. Mariam place ensuite une petite portion de Cachupa de la veille qu’elle réchauffe dans une vieille poêle : « Tu vas goûter la Cachupa de la veille ; c’est encore meilleur quand c’est réchauffé ; nous la mangeons au petit-déjeuner ; il faut encore deux heures de cuisson, je ne pense pas que tu auras le temps de goûter la nouvelle »
Je m’assois à une table et la Cachupa m’est servie ; il est vrai que le plat est délicieux. A chaque fourchette, je peux sentir l’intégralité des ingrédients dont le mariage est un long fleuve tranquille. Une fusion des éléments qui en subliment le goût. Dans cette indescriptible symbiose, les haricots craquent sous les dents ; la viande relève le goût des végétaux et un peu à la manière d’un chasseur de trésors, je m’amuse à découvrir les ingrédients que je place délicatement dans ma bouche pour un voyage au long-cours. La Cachupa, bien plus qu’un spectacle !
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